Maladie de la goutte : symptômes et traitement d'un excès d'acide urique

  • Par Myriam Gorzkowski, mis à jour le 03/10/2024 à 17h10, publié le 25/06/2020 à 08h06
  • Temps de lecture : ~ 0 minutes
Maladie de la goutte : symptômes et traitement d'un excès d'acide urique
La goutte est un rhumatisme inflammatoire caractérisé par la présence de dépôts de microcristaux d’acide urique au sein des articulations. Connue depuis l’Antiquité, elle a été longtemps associée à une maladie du « bien vivre », en rapport avec une alimentation trop riche, ce qui lui a valu le surnom historique de « maladie des rois ». C’est en fait une pathologie chronique provoquée par une quantité trop importante d’acide urique dans le sang. Elle se manifeste par des épisodes aigus très douloureux, la fameuse crise de goutte, liée à une inflammation articulaire consécutive à la cristallisation de l’acide urique. La goutte est une maladie qui se soigne très bien à condition de prendre un traitement à vie et de suivre certaines habitudes diététiques. Sans prise en charge, elle peut endommager à terme les articulations et la fonction rénale. Pharma GDD fait le point sur la goutte.

Qu’est-ce que la maladie de la goutte ?

La goutte est une maladie qui touche environ 1 % de la population. Elle atteint surtout les hommes à partir de 40 ans et les femmes après la ménopause. Le risque augmente avec l’âge, le surpoids, et en présence de pathologies associées comme l’hypertension artérielle ou le diabète.
La maladie de la goutte se caractérise par une hyperuricémie, c’est-à-dire un taux élevé d’acide urique dans le sang. Au-delà d’une certaine concentration (60 mg/litre), elle cristallise et forme des dépôts de cristaux au niveau des articulations, provoquant parfois une inflammation articulaire à l’origine d’un épisode aigu violent et très douloureux : la crise de goutte. Elle fait partie des pathologies rhumatismales microcristallines, tout comme la chondrocalcinose ou l’apatite.
Cependant, même si le taux sanguin de l’acide urique est supérieur à la normale, seuls 10 % des personnes développeront une goutte, c’est-à-dire une arthropathie inflammatoire.

La prévalence croissante de la goutte au sein des pays industrialisés est en partie liée à l’augmentation du nombre croissant d’obèses à travers le monde. La goutte est la première cause d’arthropathie inflammatoire des pays occidentaux.

Un excès d’acide urique dans le sang

L’acide urique est un composé naturellement présent dans le sang puisqu’il est issu de la dégradation d’une catégorie de protéines, les purines, qui proviennent de l’alimentation ou de notre métabolisme (catabolisme protéique), en rapport avec le renouvellement cellulaire naturel et permanent de l’organisme.
L’acide urique est éliminé par les reins, son taux sanguin dépendra donc de l’équilibre constant entre sa synthèse et son élimination rénale.
Une quantité trop importante d’acide urique dans le sang (hyperuricémie) peut avoir ainsi deux origines possibles :
 
  • Un excès de production dû à une alimentation trop riche en protéines (viande rouge, fruits de mer), une consommation excessive d’alcool ou de sodas sucrés, ou une destruction plus importante de cellules (pathologies humorales, leucémie).
  • Une diminution de l’élimination rénale de l’acide urique. Elle représente la cause la plus fréquente (90 %), et est probablement liée à des mutations génétiques affectant son mécanisme d’excrétion par le rein. Certaines situations contribuent également à abaisser son élimination : pathologies rénales, prises de médicaments diurétiques, déshydratation.
Les valeurs de référence de l’uricémie sont : 40 à 60 mg/L chez l’homme et 30 à 50 mg/L chez la femme.

Causes de l’hyperuricémie

De nombreuses situations peuvent être à l’origine d’une hyperuricémie :

Implications génétiques

Certaines maladies génétiques sont à l’origine d’une augmentation du taux sanguin de l’acide urique. Ce sont des pathologies rares affectant le jeune sujet. Elles sont responsables de déficits enzymatiques affectant les voies métaboliques des purines. C’est le cas de la maladie de Lesh-Nyhan provoquant des atteintes neurologiques, un retard psychomoteur et des lithiases rénales.
D’autre part, des études récentes ont attesté une susceptibilité individuelle à une hyperuricémie. Elles ont mis en évidence des modifications génétiques impliquant les gènes codant le mode d’élimination de l’acide urique.

Pathologies

Certaines pathologies entraînent une accélération des renouvellements cellulaires à l’origine d’une hyperuricémie. C’est le cas notamment des hémopathies malignes (leucémie), des anémies hémolytiques, ou du psoriasis étendu.

L’alimentation

Si des traitements médicamenteux peuvent aider, l’alimentation a, elle aussi, un rôle à jouer.
Une alimentation riche en purines peut élever l’uricémie de 5 à 10 mg/L, tout comme un régime trop strict, car l’organisme va puiser dans ses réserves en augmentant le catabolisme des protéines de réserve.
Parmi les aliments les plus riches en purines, on citera les viandes rouges, les poissons gras (hareng, anchois) les fruits de mer, les abats.
L’alcool, la bière (même sans alcool), sont également une source importante de purines. Les sodas sucrés sont aussi à éviter, car ils contiennent du fructose, reconnu comme un nouveau facteur de risque de la goutte.

Pathologies rénales

En altérant l’élimination de l’acide urique par voie urinaire, toute affection rénale entraîne un taux plus élevé d’acide urique dans le sang (insuffisance rénale chronique, néphropathies). C’est également le cas de certains traitements médicamenteux au long cours, comme les diurétiques, certains antihypertenseurs, l’aspirine à faible dose, la ciclosporine…

Le syndrome métabolique

De nombreuses études ont attesté une corrélation entre surpoids et goutte. Il a été mis en évidence également que 70 % des patients souffrant de la goutte étaient atteints d’un syndrome métabolique. 
Le syndrome métabolique se définit comme une obésité viscérale (accumulation de graisse au niveau abdominal), associée à au moins deux autres critères : taux élevé de lipides, hypercholestérolémie avec un taux faible en cholestérol HDL, hypertension artérielle et hyperglycémie.

Âge, sexe et secteur géographique

Le risque de développer la goutte augmente avec l’âge (3 fois plus au-delà de 65 ans). Si vous êtes de sexe masculin, vous aurez 4 fois plus de chance d’être atteint. Si vous êtes une femme, c’est après la ménopause que vous risquez d’avoir la goutte, les œstrogènes ayant une activité uricosurique.
La goutte touche préférentiellement les pays occidentaux, en rapport certainement avec une alimentation trop riche, un vieillissement de la population, et la prescription de médicaments diurétiques dans le traitement de l'hypertension artérielle.

Diagnostic de la goutte

Le diagnostic de la goutte repose sur des examens biologiques qui vont révéler l’hyperuricémie. Cependant, certaines personnes ont une uricémie normale pendant une crise de goutte. Le dosage sanguin de l’acide urique est un examen qui doit être renouvelé régulièrement. Un dosage de la créatine peut également s’avérer utile pour vérifier le bon état des reins.
Pour confirmer le diagnostic, les examens radiologiques et la ponction articulaire vont mettre en évidence les dépôts de cristaux d’acide urique.
L’interrogatoire du patient permet également d’identifier les éventuels facteurs de risques, comme les antécédents familiaux, les habitudes alimentaires, la prise de médicament.

Les symptômes de la goutte

Même si le taux d’acide urique dans le sang est élevé, la goutte peut se manifester de différentes façons. Elle peut être totalement asymptomatique, déclencher une crise inflammatoire aigüe ou revêtir une forme chronique, si l’hyperuricémie n’est pas contrôlée dans le temps.

La crise de goutte

La crise de goutte est la manifestation clinique de la maladie de la goutte. Elle correspond à la saturation en acide urique des liquides et tissus articulaires, qui va alors cristalliser sous forme de microcristaux d’urate de sodium et provoquer une inflammation. Celle-ci est favorisée en milieu acide et lorsque la température est plus basse (articulations distales).

La forme la plus typique est une inflammation aigüe de l’articulation métatarso-phalangienne du gros orteil qui devient rouge, gonflé, chaud et très douloureux. Les premiers symptômes surviennent généralement de façon brutale la nuit et le patient est réveillé par une violente douleur pulsatile au niveau d’une ou plusieurs articulations, avec parfois de la fièvre des frissons et une sensation de malaise général.

Plusieurs situations sont susceptibles de déclencher une crise de goutte : un repas riche et copieux, une consommation plus importante d’alcool, une déshydratation (exercice physique, sudation importante), un jeûne, un traumatisme, une suite chirurgicale. Certains symptômes avant-coureurs pourront parfois vous alerter, comme une petite douleur articulaire, une mobilité altérée, des fourmillements….

Les premières crises sont souvent monoarticulaires, touchant préférentiellement le pied, mais d’autres articulations de la main, du poignet, de la cheville, du coude, ou du genou peuvent également être concernées. La crise cède au bout de quelques jours et d’autres épisodes aigus peuvent survenir, plus ou moins fréquemment.
Avec le temps, ils ont tendance à se rapprocher et à être plus intenses, avec une atteinte des structures périarticulaires, d’autant plus si un traitement de fond n’est pas mis en place.

La goutte chronique

Si le taux d’acide urique n’est pas correctement contrôlé, la présence de cristaux d’urate de sodium au sein de l’organisme est constante. Ils vont s’accumuler au fil du temps au niveau des articulations et des tissus environnants, provoquant à terme des déformations et des destructions articulaires, c’est la goutte chronique. Avec les années, les amas deviennent plus volumineux et visibles en permanence : c’est le tophus goutteux ou tophi, des dépôts sous-cutanés formant des nodules au niveau des doigts, des coudes, du tendon d’Achille ou parfois de l’oreille.

Traitement de la maladie de la goutte

Pathologie chronique, la goutte nécessite un traitement afin d’éviter d’éventuelles séquelles potentiellement dangereuses. En effet, si le taux d’acide urique n’est pas contrôlé dans le temps, cette hyperuricémie peut entrainer à terme des atteintes articulaires parfois invalidantes et contribuer à endommager certains organes, notamment le rein (calculs rénaux, néphropathie).
Le traitement de la goutte consiste d’une part à soulager la crise de goutte, et d’autre part à faire baisser le taux sanguin de l’acide urique. Il est également indispensable de modifier certaines habitudes alimentaires afin de diminuer le risque d’hyperuricémie.

Soulager la crise de goutte

Pour soulager la crise de goutte, il faut mettre au repos l’articulation en immobilisant le membre grâce à une attelle de cheville ou encore une attelle pour le poignet, pouce et doigt.


L’application locale de froid avec des poches de glace soulagera également les douleurs.

Les traitements médicamenteux de la crise de goutte sont destinés à calmer l’inflammation articulaire. Les médicaments traditionnellement utilisés sont la colchicine, les anti-inflammatoires non stéroïdiens et les corticoïdes.
De nouvelles thérapies à base d’inhibiteurs de l’interleukine-1-β représentent une alternative thérapeutique intéressante dans les formes graves et chez certains patients résistants aux traitements habituels ou plus fragiles. Elles agissent de façon plus ciblée sur les mécanismes de l’inflammation.

Traitement de fond de la goutte

La goutte est une maladie chronique nécessitant un traitement de fond dont l’objectif est de normaliser le taux d’acide urique sanguin, soit un taux inférieur à 60 mg par litre. Il fait appel à une catégorie de médicaments, les hypouricémiants qui vont agir en diminuant la synthèse de l’acide urique (allopurinol), ou en augmentant son élimination rénale (uricosurique).
Même si aucun symptôme ne se manifeste, il est très important d’avoir à l’esprit qu’un taux élevé d’acide urique est dommageable pour la santé à plus ou moins long terme. C’est pour cette raison qu’il est très important de suivre correctement et régulièrement un traitement de fond si celui-ci a été instauré par votre médecin.

D’autre part, de nombreuses données recueillies semblent attester qu’une hyperuricémie entrainait un risque accru de maladies cardiovasculaires (AVC, infarctus) ainsi qu’une progression des pathologies rénales chroniques. Un suivi médical régulier est indispensable en cas de goutte.

Actuellement l’instauration d’un traitement de fond hypo-uricémiant de la goutte est préconisée en cas d’accès goutteux récidivants (plus de 2 fois par an), en présence de trophi, ou en cas d’arthropathie gouteuse. Après une première crise de goutte, il sera également indiqué chez les personnes jeunes (moins de 40 ans), et en cas de pathologies cardiovasculaires associées.

Adjuvants naturels du traitement de la goutte

Certains compléments alimentaires détox de phytothérapie à visée dépurative et diurétique pourront également contribuer à favoriser l’élimination d’acide urique des articulations dans les urines. C'est le cas du bouleau blanc, de la reine des prés, du frêne ou de l'ortie. Parlez-en à votre médecin.

En homéopathie, la souche Uricum acidum est utilisée pour la goutte et ses complications rénales.

La vitamine C, que l'on trouve en grande quantité dans l'acérola, est également reconnue pour avoir des propriétés uricosuriques.

Mesures diététiques en cas de goutte

Si vous souffrez de la maladie de la goutte ou si votre taux d’acide urique est élevé, il est indispensable de suivre certaines mesures hygiénodiététiques.

Adoptez votre alimentation

Éviter les aliments riches en purines qui sont susceptibles de faire augmenter votre taux. Même si le régime ne suffit pas à normaliser à lui seul l’uricémie, il va contribuer à favoriser une perte de poids en cas d’obésité, ou à faire baisser vos valeurs lipidiques.

Les aliments à proscrire sont notamment les viandes et les poissons gras, les fruits de mer, les abats. Ainsi, les abats (ris de veau, rognons, foie, cervelle, …) sont vivement déconseillés, tout comme les viandes fumées, les viandes rouges, les gibiers (pigeon, canard, oie, …) ou les bouillons de viande. Côté poisson, mieux vaut éviter l'anchois, le hareng, la sardine, la carpe, le brochet, la morue, le saumon, la truite, mais aussi les œufs de poissons. Les coquillages, crustacés et soupes de poisson sont aussi à proscrire.

Pour réduire la fréquence et l’intensité des crises, certains aliments sont à privilégier en cas de goutte : c’est le cas des viandes maigres (poulet, dinde, …), des œufs, de certains poissons comme la sole, la limande ou le merlu.
À noter, les purines d’origine végétale (pois, lentilles, haricots, épinard, chou, chou-fleur, chou chinois, radis, rhubarbe, champignon, poireau, tomate et asperge) n’augmentent pas le risque de crise de goutte, car elles ne se transforment pas en acide urique et sont sources de protéines, de fibres et de minéraux. Pour les féculents, favorisez les produits à base de céréales complètes et pour assaisonner vos plats, les huiles d’olive, de noix ou de colza sont excellentes pour le cœur.

Les boissons

Il est important de consommer de l’eau en quantité suffisante afin d’éliminer l’acide urique (1,5 litre à 2 litres par jour). Il sera nécessaire de limiter la consommation d’alcool notamment de bières puisqu’elles contiennent plus de purines que n’importe quel autre breuvage. Occasionnellement, vous pouvez vous accorder un verre de vin, lors d’une soirée entre amis par exemple. Les sodas, les jus de fruits (les fruits mixés développent une fermentation), les boissons chocolatées doivent également être proscrits. Vous pouvez en revanche boire du lait de vache allégé qui provoque une baisse rapide du taux sérique d’acide urique, du café et bien-sûr de l’eau gazeuse (Quézac, Vichy, Badoit, …) ou non gazeuse (Contrex, Evian, Vittel, …), car il est important de rester bien hydraté.

Les acides gras saturés diminuent la capacité du corps à éliminer l’acide urique. Il est primordial de réduire la consommation en évitant par exemple le fromage à plus de 20 % de mg, le lait entier, le beurre, la crème, les pâtisseries etc… Les produits laitiers allégés sont à privilégier et augmenter vos apports en fruits riches en vitamine C, car elle favorise l’élimination rénale de l’acide urique.
 
Les jus de fruits non chargés en fructose sont à privilégier comme les abricots, les bananes ou les fruits de la passion, des fruits rouges et des cerises. Les sodas et jus riches en fructose sont à éviter. Vous pouvez aussi manger du fromage à moins de 20 % de mg et des yaourts sans excès.

Conclusion

La goutte est une maladie chronique caractérisée par un taux élevé d’acide urique dans le sang, se manifestant chez certaines personnes prédisposées par des épisodes aigus provoqués par la cristallisation de l’acide urique au niveau articulaire. Pour éviter la survenue des crises de goutte, et limiter la dégradation des fonctions articulaires et rénales au long cours, un traitement de fond associé à des mesures diététiques sont mis en place, afin de normaliser le taux sanguin d’acide urique. Un suivi médical régulier doit également être mis en œuvre, car la goutte augmente le risque de maladies cardio-vasculaires et de pathologies rénales chroniques.