Le Syndrome hémolytique urémique
- Par Isabelle Briennon, mis à jour le 19/09/2025 à 08h09, publié le 03/09/2025 à 16h09
 
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        Qu’est-ce que le Syndrome hémolytique urémique ou SHU ?
Le Syndrome hémolytique urémique appelé aussi SHU ou Maladie du Hamburger est une maladie rare, mais grave survenant le plus souvent chez les jeunes enfants.
Tous les ans, en France, 150 enfants sont frappés par la maladie.
Les plus touchés sont les enfants âgés de moins de 3 ans.
Cette maladie est la conséquence grave d’une infection des intestins par une bactérie Escherichia coli ou (E. coli) très pathogène.
La bactérie se trouve le plus souvent dans des aliments contaminés ou bien sur les doigts souillés de l’enfant. Une fois avalée, E. Coli se propage dans les intestins en libérant des toxines, les Shiga toxines (ou véro toxines) à l’origine de la toxicité de cette bactérie. Les toxines vont attaquer la paroi de l’intérieur des intestins jusqu’à rompre les vaisseaux sanguins s’y trouvant. Les vaisseaux vont saigner créant une hémorragie intestinale qui se retrouve dans les matières fécales de l’enfant sous forme de diarrhées sanglantes. Puis les toxines atteignent les reins, qu’elles altèrent en créant une insuffisance rénale aigue.
Toutes les bactéries E. Coli ne libèrent pas de toxines. La plupart des E. Coli sont inoffensives et vivent dans les êtres vivants en harmonie avec d’autres bactéries (on parle d’équilibre microbiotique). Les E. Coli peuvent donner des diarrhées importantes, mais sans gravité.
Le SHU est provoqué par une souche de la bactérie E. Coli dite « entérohémorragique » (ECEH), c’est-à-dire causant une hémorragie dans les intestins.
La maladie affecte ensuite le rein et une insuffisance rénale aigue survient rapidement si elle n’est pas traitée conduisant parfois au décès de l’enfant.
Si l’enfant survit, il peut garder des séquelles au niveau du cerveau ou du cœur ou bien garder une insuffisance rénale chronique à vie d’où l’importance d’une prise en charge en urgence de la maladie.
La maladie passe spontanément chez le grand enfant, l’adolescent et l’adulte.
Elle reste grave non seulement chez les jeunes enfants de moins de 5 ans, mais aussi chez la femme enceinte et chez les personnes âgées qui ont une immunité faible.
Plus rarement, le SHU peut être dû à une autre bactérie, une bactérie du genre shigelle et dans ce cas, l’infection est encore plus sévère et mortelle.
Quelles sont les causes du SHU ?
Quelles sont les causes du SHU chez l'enfant ?
Le SHU survient lorsque la souche bactérienne E. Coli entérohémorragique (ECEH) se trouve :
- dans un aliment ou une boisson ingérée par l’enfant ;
 - sur les doigts de l’enfant qui va les porter à la bouche et se contaminer. L’enfant aura caressé un animal souillé ou bien touché des objets ou un environnement porteur de la bactérie. L’enfant peut aussi avoir été en contact avec une personne porteuse de la maladie.
 
De nombreux aliments peuvent être contaminés par la bactérie ECEH et il est important de se souvenir ou de connaître (enfant mangeant en collectivité) ce que mange l’enfant pour pouvoir répondre à l’interrogatoire du médecin. Les aliments pouvant être contaminés sont :
- la viande de bœuf (la bactérie vit dans le tube digestif des bovidés), le veau, notamment les steaks hachés ;
 - les produits laitiers non pasteurisés (lait cru, yaourt ou fromages au lait cru…) ;
 - les fruits, légumes, herbes aromatiques souillés par de l’eau contaminée.
 
Quelles sont les causes du SHU chez l'adulte ?
Il est à noter que l'infection peut toucher des personnes de tout âge de l'enfance à l'âge adulte et qu'elles peuvent être contaminées de la même façon qu'un enfant. Chez l’adulte, la contamination par une ECEH peut également avoir lieu lors de la traite ou de l’abattage d’animaux contaminés.
Quels sont les signes du Syndrome hémolytique urémique S H U ?
Il est important de savoir reconnaître les signes cliniques de la maladie pour pouvoir la dépister le plus tôt possible afin de la prendre en charge en urgence.
Il y a une première phase de symptômes avant la phase du SHU, une phase de gastroentérite avec diarrhées.
Première phase :
Les symptômes apparaissent en général 3 à 4 jours après le contact contaminant et même parfois jusqu’à 10 jours, voire 1 mois après.
Le début de la maladie est brutal.
L’enfant commence à se tortiller, il a des crampes abdominales et commence à se plaindre de maux de ventre.
Puis viennent des diarrhées. Ces diarrhées contiennent le plus souvent des glaires et du sang (colites hémorragiques) mais parfois ce n’est pas le cas.
L’enfant peut avoir la nausée ou même vomir et il peut avoir de la fièvre. Il est important de penser à le réhydrater avec un soluté de réhydratation.
Lorsque ces symptômes surviennent, le médecin doit être contacté très rapidement si l’enfant est jeune.
Dans 90 % des cas, cette première phase guérit spontanément.
Deuxième phase : c’est le SHU qui est une urgence vitale
Dans 10 % des cas, l’infection par E. Coli progresse et le Syndrome hémolytique urémique s’installe.
3 à 4 jours après la diarrhée sanglante, celle-ci disparaît, mais l’enfant devient abattu, il est pâle et fatigué, il est grognon et ne joue plus. On remarque qu’il urine de moins en moins et que ses urines sont foncées (ce qui est le signe d’une insuffisance de travail de ses reins). On voit apparaître des hématomes et un purpura (petites taches rouges sur la peau).
                                                                
Puis surviennent des troubles cardiaques, une insuffisance rénale, une atteinte du pancréas, du foie et des troubles neurologiques tels que convulsions, troubles de la conscience et coma.
NB : il arrive dans 10 % des cas qu’il n’y ait pas de première phase. C’est le syndrome hémolytique urémique atypique qui est dû à une autre cause que la bactérie E. Coli et qui est également une urgence vitale.
Quel est le traitement du syndrome hémolytique urémique SHU qui est dû à E. Coli ?
Le SHU est une complication grave, parfois mortelle de l’intoxication par la bactérie E. Coli entérohémorragique.
L’enfant doit donc être pris en charge à l’hôpital.
Il sera mis parfois sous traitement antibiotique (un antibiotique précis est utilisé) pour tuer la bactérie.
De plus, l’hémorragie intestinale est suffisamment grave pour que l’enfant perde des globules rouges (anémie hémolytique) et des plaquettes (thrombocytopénie). Par ailleurs, ses reins sont aussi touchés et l’affection peut évoluer jusqu’à l’insuffisance rénale aigue. Pour éviter cela, une transfusion sanguine est nécessaire (apport de cellules sanguines) et une dialyse permet de nettoyer son sang tout en mettant ses reins déjà sérieusement atteints au repos. Enfin, l’échange plasmatique permet de nettoyer le sang de la présence de la bactérie et des toxines.
La diarrhée et les vomissements qui entraînent une perte de liquide importante seront traités par la prise de solution de réhydratation à base d’eau et de sels minéraux.
Aucun antidiarrhéique ne sera donné à l’enfant pour lutter contre la colite, car la bactérie et les toxines doivent absolument être éliminés le plus vite possible, la diarrhée étant le moyen physiologique du corps pour s’en débarrasser, sachant qu’il faut cependant compenser la déshydratation qu’elle induit.
Contre la douleur, les médicaments codéinés contre la douleur et les anti-inflammatoires ne seront pas utilisés, car les premiers ralentissent le transit et donc l’élimination de la bactérie et les deuxièmes sont déconseillés en cas de problèmes au niveau des reins, qu’ils peuvent aggraver.
Il est possible parfois de voir utilisés des anticorps monoclonaux (éculizumab…) pour diminuer les lésions au niveau des reins.
Comment prévenir la Maladie du Hamburger ?
Le Syndrome hémolytique urémique ou Maladie du Hamburger peut être évité en mettant en place des règles alimentaires et en prenant des précautions d’hygiène vis-à-vis des enfants de moins de 5 ans.
Sachant que la bactérie E. Coli résiste au froid, mais est tuée à la chaleur :
- Bien cuire les steaks, en particulier les steaks hachés, jusqu’au centre (à 70°C), ne jamais donner de viande bleue ou saignante aux jeunes enfants.
 - Consommer dans la journée un steak haché préparé par le boucher à la demande et veiller à la chaîne du froid pour les steaks hachés surgelés (à la moindre rupture, par exemple, congélateur en panne, jeter le steak haché).
 - Consommer rapidement les restes alimentaires et les plats cuisinés.
 - Ne pas rajouter de la farine non cuite dans un aliment cuit (par exemple pour épaissir une sauce…).
 - Ne jamais donner de la farine non cuite en tant qu’aliment (pâte à crêpes, à gâteau, à cookies…) ou bien pour jouer (pâte à modeler faite maison…). Les céréales, telles que le blé, peuvent être souillées par de l’eau contaminée par E. Coli)
 - Bien cuire les saucisses.
 - Ne jamais donner à boire du lait cru. Seul le lait pasteurisé peut être donné aux enfants.
 - Ne jamais donner de yaourts au lait cru, ni de fromage frais, de fromages à pâte molle au lait cru style Reblochon, Brie, Roquefort, Mont d’Or ou certains camemberts au lait cru ou de yaourt au lait cru (souvent des produits dits « de ferme »). Ne sont autorisés que les yaourts et fromages au lait pasteurisé, les fromages à pâte pressée et cuite type gruyère, emmental, Comté ou Beaufort et les fromages fondus à tartiner.
 - Toujours laver et éplucher fruits et légumes, laver les herbes aromatiques.
 - Ne jamais donner de jus de pommes (ou autres fruits) non pasteurisés aux jeunes enfants.
 - Ne pas faire boire d’eau de puits ou de sources non contrôlées sanitairement.
 - Éviter toute baignade dans des ruisseaux, des lacs, des étangs ou des marres à la campagne. En effet, ces eaux peuvent être contaminées par des déjections d’animaux malades (il n’y a pas de contrôle sanitaire).
 - Lors de la visite de fermes, on ne sait pas s’il y a des animaux contaminés par l’ECEH (vaches, veaux, chèvres ou moutons). Par conséquent, dans le doute, il est recommandé d’être très prudent sur l’hygiène sur place et de laver les mains des enfants fréquemment.
 - S’il y a une personne malade dans la famille, éviter tout contact avec les jeunes enfants.
 - En cas d’épidémie de gastro-entérite, acheter des repas tout prêts (ne pas cuisiner) et ne pas fréquenter les piscines.
 - Pour les enfants vivant en collectivité (crèches, école, restaurant scolaire…), si un seul enfant est porteur de la maladie, d’autres enfants peuvent être contaminés (E. Coli peut entraîner des toxi-infections alimentaires dans les collectivités). Lors de l’entrée en collectivité, on recommande aux parents d’apprendre aux tout-petits de se laver les mains, à l’eau et au savon. Les aidants doivent, bien sûr, s’assurer que le lavage des mains soit bien fait et de la répétition fréquente de cette règle d’hygiène essentielle.
 - Pour l’adulte ou l’aidant à la maison ou en collectivité, l’hygiène strict des mains, après le changement de couches, après avoir été aux toilettes, après avoir caressé un animal et avant la préparation des repas, est la règle d’or. L’hygiène des ustensiles de cuisine est aussi très importante, notamment des couteaux à viande pour couper la viande crue. Il est également essentiel de ne pas mélanger les aliments crus avec les cuits pour ne pas contaminer les cuits et de bien les ranger séparément dans son frigo. Le plan de travail sur lequel on a découpé la viande crue doit aussi être correctement lavé pour ne pas contaminer par la suite des aliments qui seront mangés crus. Il est même préférable d’avoir une planche à découper pour la viande et une autre pour les légumes.
 
À retenir
Le Syndrome hémolytique urémique (SHU) est une maladie grave qui touche surtout les jeunes enfants de moins de 5 ans. C’est la suite d’une gastro-entérite due à une bactérie très pathogène que l’on trouve le plus souvent dans la viande de bœuf insuffisamment cuite d’où son nom de « Maladie du hamburger ». L’infection par la bactérie commence par des douleurs abdominales puis viennent les diarrhées sanglantes. Quelques jours plus tard, le SHU s’installe avec un abattement de l’enfant, une diminution des urines, des pétéchies sur la peau et des troubles touchant plusieurs organes dont les reins et le cerveau. Si la maladie n’est pas prise en charge à temps, s'ensuivent le décès ou tout au moins de lourdes séquelles.
À lire également, l’infection intestinale par la Salmonelle.
Sources :
Bienaime, F., Dragon-Durey, M. A., Regnier, C. H., Nilsson, S. C., Kwan, W. H., Blouin, J., ... & Fremeaux-Bacchi, V. (2010). Mutations in components of complement influence the outcome of Factor I-associated atypical hemolytic uremic syndrome. Kidney international, 77(4), 339-349.
Banerjee, S. (2009). Hemolytic uremic syndrome. Indian Pediatr, 46(12), 1075-84.
Noris, M., & Remuzzi, G. (2005). Hemolytic uremic syndrome. Journal of the American Society of Nephrology, 16(4), 1035-1050.
https://journals.lww.com/jasn/citation/2005/04000/hemolytic_uremic_syndrome.30.aspx
Talarico, V., Aloe, M., Monzani, A., Miniero, R., & Bona, G. (2016). Hemolytic uremic syndrome in children. Minerva Pediatrica, 68(6), 441-455.
https://www.hauts-de-france.ars.sante.fr/saint-quentin-plusieurs-cas-dintoxications-alimentaires-severes-dont-4-cas-de-syndrome-hemolytique
https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-infectieuses-d-origine-alimentaire/syndrome-hemolytique-et-uremique-pediatrique/la-maladie/#tabs
Questions / Réponses
Quelle est la triade du Syndrome hémolytique et urémique ?
Au niveau biologique, le SHU se manifeste par 3 évènements. C'est la " triade du SHU" qui permet de faire le diagnostic de cette maladie.
La toxine bactérienne est à l'origine de 2 évènements au niveau sanguin :
- une anémie hémolytique avec une perte prématurée de globules rouges, l'anémie hémolytique, liée à la crise hémolytique, entraînant une pâleur, une fatigue et des vertiges ;
 - une thrombocytopénie avec une chute des plaquettes qui diminuent en dessous de la normale, ceci se manifestant par des saignements cutanés, avec hématomes et pétéchies (taches rouges sur la peau), des saignements des gencives, du sang dans les urines et dans les selles.
 
L'ensemble de ces deux évènements, anémie et thrombocytopénie, expliquent la classification du SHU dans la famille de maladies appelées "Microangiopathies thrombotiques", pathologies dans lesquelles les micro vaisseaux sanguins sont bouchés par une accumulation de plaquettes.
La toxine bactérienne est également à l'origine d'1 évènement au niveau rénal :
- une insuffisance rénale aigue avec un rein qui, très rapidement, n'effectue plus son travail de filtration, ce qui est à l'origine d'une diminution des urines, d'une fatigue importante, de vomissements et de maux de tête et qui peut conduire à une confusion et à terme au coma.
 
Qu'est-ce qu'une crise hémolytique ?
Une hémolyse est la destruction massive et rapide des globules rouges. On parle de crise lorsque cet évènement est brutal et intense comme dans le SHU. Cette crise hémolytique conduit à une anémie qui est caractérisée par une baisse du nombre de globules rouges inférieure à la normale et une baisse de l'hémoglobine. Cette anémie est d'origine hémolytique car elle est due à une destruction prématurée des globules rouges dont la durée de vie est raccourcie, par les toxines de la bactérie ECEH (à différencier de l'anémie par carence d'apport alimentaire en fer, par exemple).
Quels sont les symptômes de la maladie Syndrome hémolytique urémique ou SHU typique ?
Le syndrome hémolytique urémique survient après une première phase de gastroentérite caractérisée par :
- des maux de ventre,
 - des crampes abdominales,
 - des nausées,
 - des vomissements,
 - de la diarrhée,
 - des glaires et du sang dans la diarrhée,
 - la présence de fièvre.
 
Environ 3 à 4 jours après l'apparition de la diarrhée sanglante, l'enfant (ou l'adulte) présente d'autres symptômes, ce sont les symptômes du SHU :
- il est abattu, fatigué,
 - il urine de plus en plus rarement,
 - ses urines deviennent foncées,
 - il présente des hématomes sur le corps,
 - des taches rouges apparaissent sur la peau (pétéchies).